Face à la pénurie de compétences, le marché commence à réagir et à s’organiser. Cependant, les initiatives restent ponctuelles et compliquées à déployer à grand échelle. C’est pourtant un enjeu majeur et collectif pour notre société d’aujourd’hui et de demain qu’il faut prendre en compte sans attendre. Comment identifier et attirer les bons profils ? Cette question est aujourd’hui plus que légitime et appelle des réponses multiples et transverses. Une nouvelle tribune signée Sylvie Blondel, Directrice des Ressources Humaines Stormshield.
Des métiers pointus, peu connus, en évolution de plus en plus rapide et permanente
Nous pouvons noter une certaine méconnaissance des métiers liés au numérique : ce point est vrai pour les étudiants mais également pour leurs parents, certains enseignants ou conseillers d’orientation. L’image du « geek » est ancrée dans les esprits de notre société et peine à évoluer. Pour autant, il ne faut pas tirer de généralité puisque des initiatives mettent en avant la prise de conscience d’amener une autre image des métiers du numérique. À Lausanne par exemple, le numérique est pris en compte dès le plus jeune âge ou les enfants sont initiés à la résolution de problèmes dès l’âge de 4 ans et au développement dès l’adolescence. Il faut donc commencer par faire connaitre les métiers, les rendre plus concrets et enfin donner envie.
Valoriser des métiers enrichissants et nécessitant des compétences multiples
Sur ce point, force est de constater que la valorisation des diverses compétences ne semble pas au rendez-vous. En ce sens, il serait fondamental de mieux les faire connaître afin de ne pas se focaliser uniquement sur les aspects purement techniques. En effet, travailler dans le monde de la cybersécurité ne doit pas être réservé à une communauté restreinte. Bien au contraire, il nécessite de faire appel à de nombreux profils complémentaires qui joueront un rôle déterminant dans le développement, la création et la mise sur le marché d’innovations permettant de créer un cyber espace de confiance. Les métiers sont créatifs, collaboratifs et riches de sens. Travailler dans la cybersécurité, c’est protéger des infrastructures, des organisations, des êtres humains. Ceci devrait motiver à choisir une telle mission.
Travailler dans le monde de la cybersécurité ne doit pas être réservé à une communauté restreinte.
Se rapprocher des écoles, des universités et des organismes de formation
Au-delà de développer et de commercialiser leurs produits et solutions, les acteurs du monde de la cybersécurité se doivent aussi de préparer l’avenir en tissant des partenariats avec les professionnels de l’enseignement pour proposer des cursus de formation qui permettront de former à grande échelle de futurs potentiels motivés. Ces collaborations avec les écoles, les universités et les organismes de formation sont incontournables pour faire bouger les lignes et positionner les sujets de la sécurité informatique au centre des programmes. On note tout de même que les pouvoirs publics semblent avoir pris conscience de cet impératif de formation avec la création du CAPES informatique 2020 et la volonté d’ajouter des heures de codage dans les programmes. Ce sont de bonnes initiatives mais encore insuffisantes.
Quand l’industrie du digital se féminise
Au-delà de la formation, on assiste depuis quelques années à une réapparition des femmes dans le monde du numérique. Même si cette évolution reste encore modeste, elle a permis à la profession d’intégrer des collaboratrices passionnées à tous les niveaux des organisations. En apportant un autre regard sur le monde de la cybersécurité, les femmes ont indiscutablement un rôle stratégique à jouer dans cette industrie. Pour cela, il faut continuer à déjouer les stéréotypes, sensibiliser les jeunes femmes dans leurs orientations et bien entendu, renvoyer l’image d’une industrie mixte, accueillante et sans préjugés. Les femmes savent faire et s’épanouissent dans le numérique : il faut le faire savoir.
Les sujets du recrutement et de la formation de collaborateurs dans le numérique sont donc au centre des enjeux de notre société dès aujourd’hui et le seront encore plus lors des prochaines années. Nous sommes déjà en pénurie de candidat(e)s. En pleine transformation numérique, les entreprises de tous les secteurs sont plus que jamais à la recherche de talents qui pourront les accompagner dans leurs changements. Cette transformation s’accélère et augmente chaque jour la surface de vulnérabilité des organisations et des infrastructures. Elle ne pourra donc se faire qu’en mettant en place des outils de confiance. C’est aussi pourquoi la cybersécurité des organisations publiques et privées est un point-clé qui nécessite de mobiliser de nombreux experts pour être menée à bien. Attention donc à ne pas jouer la carte du statu quo puisque c’est bien aujourd’hui que nous construisons les conditions de notre réussite de demain. La dimension de cette problématique de recrutement se joue dans tout l’écosystème, ce serait une erreur de la cantonner à une approche purement scolaire. Elle doit être appréhendée dans sa globalité faute de quoi nous n’y arriverons pas.